La maladie

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Écrit par Maréva Bernard

Maréva est manager de projet et coach. Elle est impliquée pour La Sauveté depuis 2012 et présidente de l'association La Galave depuis 2016. Elle pratique le Dzogchèn depuis 2011.

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Dans cet article, Maréva nous montre qu’avec la vue adéquate, l’inconfort de la maladie peut devenir source d’entraînement, de lien au maître et de rappel de la nature.

Série : Les conditions difficiles dans le Dzogchèn

 

La maladie

 

Parfois nous nous disons que nous sommes trop fatigués pour pratiquer et nous choisissons d’aller nous coucher. Cela semble encore plus compliqué quand nous sommes malades.

Quand nous ne tenons plus assis sur une chaise, nous nous demandons si nous pouvons encore pratiquer. Quand nous avons une rage de dent, nous nous demandons si nous pouvons encore pratiquer. Nous nous disons : oui, non, peut-être. Souvent sans certitude.

Dans le Dzogchèn, toutes les conditions sont celles de la pratique. Alors quand nous sommes malades, c’est aussi la condition de la pratique.

Extérieurement, nous pouvons avoir l’impression que les conditions ne sont plus présentes.

Le corps ne se tient plus assis. Cela nous demande trop d’effort, accentue nos douleurs, nous avons besoin de dormir. Nous ne pouvons plus tenir la posture en 7 points de Vairocana.

Le brouillard mental est présent. L’intensité de la douleur prend toute la place, l’effet des médicaments nous abrutit, la fièvre brouille notre raisonnement. Nous ne pouvons plus nous concentrer sur une visualisation spécifique.

Notre bouche est sèche et notre souffle court. Nos mains sont trop engourdies pour égrener le mala, notre gorge trop nouée pour sortir un son, notre cou trop raide pour lever le regard. Nous ne pouvons plus chanter le A primordial.

Et pourtant.

 

 “Nous pouvons nous réjouir de ce terrain d’entraînement sans artifice, où se révèle l’essentiel.”

 

Extérieurement cette expérience nous rappelle directement à l’impermanence de notre corps. Ce que nous vivons aujourd’hui, nous le vivrons de nouveau, encore plus intensément, au moment de la mort.

Alors que nous avons perdu temporairement une partie de nos facultés, nous prenons conscience de leur préciosité. Ce qui nous semblait acquis s’avère ne pas l’être. Nous pouvons même élargir notre pensée en réalisant que la souffrance que nous expérimentons est partagée par des milliards d’êtres.

Nous pouvons nous réjouir de cette opportunité de raviver notre motivation à cheminer vers l’Eveil pour le bien de tous les êtres.

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Intérieurement, c’est le moment parfait pour rappeler le refuge car il ne dépend ni de notre posture, ni de la clarté de notre esprit, ni de la vibration de notre voix.

Nous pouvons faire des souhaits et nous relier à notre maître, à la nature. Ce lien nous donne la force de reconnaître la nature illusoire de ce que nous sommes en train de vivre, de réaliser que le chemin ne se cantonne pas à la pratique formelle et que le lien au maître est comme le fil de vie qui relie toutes nos expériences. L’expérimentant directement, nous savons à présent que ce lien peut être rappelé partout, qu’il ne nous quittera jamais, même au moment de la mort. Notre état nous permet de voir ce qui tient et qui est immuable quelles que soient les conditions.

Nous pouvons nous réjouir de ce terrain d’entraînement sans artifice, où se révèle l’essentiel.

Ultimement, il n’y a aucune différence dans la nature de notre esprit entre ce jour où nous courions, vaillants, jusqu’au sommet de la montagne et celui-ci où nous sommes bloqués frissonnant au fond de notre lit. Alors que notre corps est meurtri, et qu’un temps d’arrêt nous est imposé, nous pouvons nous retourner vers l’observateur et nous questionner sur “qui souffre ?”.

 

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Alors nous nous rappelons ce que Jamyang Khyentse Chökyi Lodrö nous dit dans “le remède universel qui guérit tous les mots :

“Toutes les manifestations naturelles sont maladie.

Toutes les maladies sont connaissance primordiale.

Demeure sans distraction dans l’état de la connaissance primordiale.”

L’observation retourne à l’état de connaissance primordiale. Nous pouvons nous réjouir car la maladie s’élève alors comme manifestation naturelle, tel le soleil qui se lève dans le ciel.

De nombreux pratiquants ont traversé moultes maladies, par le passé comme aujourd’hui. Par leur immense compassion, ils nous montrent le chemin. Ils nous montrent que l’état naturel ne dépend pas de la souffrance physique. Qu’elle peut être chemin de compassion et de sagesse.

Alors, la prochaine fois que nous serons malades nous pouvons repenser aux enseignements que nous avons reçus. Aux maîtres auxquels nous nous relions. A la nature que nous avons entre-aperçue.

 

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