Processus Créatif

Bon… je dois écrire un article pour Dzogchen Today!

Écrit par Damien Brohon

Damien Brohon est un artiste, un enseignant et un auteur. Il étudie et pratique le Bouddhisme et le Dzogchèn depuis 30 ans.

Blog | Et moi dans tout ça ?

Dans cet article, Damien Brohon nous parle de la réalité (ou de l’irréalité) de nos pensées, du processus créatif de l’esprit, et de la difficulté d’écrire un article pour Dzogchen Today! !

[DISPLAY_ULTIMATE_PLUS]

Bon… je dois écrire un article pour Dzogchen Today!… mais mon esprit est aussi encombré que l’est mon bureau : des piles de livres d’Orient et d’Occident qui s’appuient sur des amoncellements de tomes savants dont le soubassement est lui-même constitué de forts volumes parmi lesquels se sont tout de même infiltrés de futiles pamphlets. Cette géographie domestique étant parsemée de divers carnets, de feuilles volantes aux contours rongés et de post-it délavés par le soleil jusqu’à être devenus illisibles, sans oublier les nécessaires échantillons de parfum, gommes sculptées par l’usage, matériel à crayonnage, paire de lunette, paire de lunette de rechange, paire de lunette qui ne sert plus du tout, bonbons aux plantes suisses, verre d’eau française avec un zeste de citron espagnol, photos de proches mais aussi de lointains, figurines en plastique, mystérieuse sculpture de jaspe noir, recharges pour le matériel de crayonnage, etc. J’arrête la liste par peur d’être fastidieux (c’est peut-être déjà trop tard).

Regardant les pensées directement, j’en arrive à un complet et libérateur retournement. Si je porte l’attention directement sur elles, soit elles disparaissent tout simplement, soit elles m’apparaissent comme des pensées et non plus comme la réalité.

Tout comme l’accumulation de ces objets occupe tout mon bureau, mes pensées encombrent l’espace intérieur dont j’ai besoin pour écrire. Elles semblent aussi concrètes qu’eux. L’article à écrire, le colis à aller chercher après cela ou cette discussion d’hier avec un ami qui continue à me trotter dans la tête, tout cela – et bien plus encore – n’est-il pas réel ? Article réel, colis réel, ami réel, donc choses concrètes, solides et, à ce titre, sollicitant de plein droit mon attention… D’où cette impression de saturation, car les sollicitations sont nombreuses et divergentes. Comment vais-je arriver à écrire avec un esprit aussi saturé ? Il me manque le vide, la disponibilité nécessaire.

 

Ah oui ! Je sais ! C’est ce qui est dit partout ! Arrêter de penser ! Faire le vide ! Sauf que… cette fameuse vacance, si souvent recherchée, n’advient pas… les pensées ne cessent de revenir. Lorsque je crois m’en être défait, elles se réincarnent en un avatar retors qui, lui aussi, cherche à m’entrainer dans un scénario particulier et ainsi de suite et sans fin. Je crois que je vais tout laisser tomber… pas possible de travailler dans ces conditions ! Ma météo mentale ne s’y prête vraiment pas.

 

 

À moins que… je ne regarde directement ces fameuses pensées. Que je les regarde elles-mêmes et non leur contenu, c’est-à-dire ce qu’elles racontent. Que sont-elles au fait ? Ce sont de très éphémères images mentales ; elles ne durent que quelques instants, voire même, presque moins qu’un instant. Elles sont des représentations de personnes, d’objets ou de situations dont la réalité, si l’on réfléchit bien,est toujours au-delà de toute pensée. Est-ce que, par exemple, l’idée que je me fais de mon ami coïncide avec ce qu’il est ? Probablement pas. Ces pensées sont elles-mêmes fort incertaines car dépendantes de toutes sorte de facteurs bien souvent transitoires comme, par exemple, notre humeur du moment ou bien le temps qu’il fait. Pensées d’été, pensées de fête nationale, pensées de rentrée. Mes pensées ne sont jamais des faits mais toujours un incertain poudroiement mental.

Regardant les pensées directement, j’en arrive à un complet et libérateur retournement. Si je porte l’attention directement sur elles, soit elles disparaissent tout simplement, soit elles m’apparaissent comme des pensées et non plus comme la réalité. Elles occupent toujours mon esprit mais désormais avec légèreté, comme si elles étaient devenues transparentes. J’abandonne ainsi le désir vain de m’en défaire. Car aussi nombreuses soient-elles, elles ne peuvent désormais plus encombrer mon espace intérieur, au contraire elles en révèlent le caractère illimité. Vues et vécues comme vides et vives à la fois, elles sont la source même de ma créativité. Sans elles, comment écrire ? En les prenant trop au sérieux, comment écrire ?

Je vais pouvoir écrire mon article finalement.

En fait, il est déjà fini !

PLUS D’ARTICLES

Où est le terrain d’entraînement ?

Dans « Où est le terrain d'entraînement ? » Damien expose comment Vue, Médiation et Intégration font de notre vie et de notre esprit LE terrain d’entraînement.  (2) Série : Où pratiquer le chemin du Dzogchèn ?   Où est le terrain d’entraînement ?   Nos...

Un bosquet paisible parsemé de fleurs

Dans cet article, Johanne évoque les qualités d’un lieu propice à la mise en retrait, pour mieux observer son esprit. Série : Où pratiquer le chemin du Dzogchèn ?   Un bosquet paisible parsemé de fleurs Où pratiquer le chemin du Dzogchèn ? « Là où l’on est ! »,...

Il n’y a qu’un lieu : la sphère unique

Dans "Il n’y a qu’un lieu : la sphère unique", Mila Khyentse parle du seul endroit où pratiquer le Dzogchèn : notre propre esprit.Série : Où pratiquer le chemin du Dzogchèn ?   Il n’y a qu’un lieu : la sphère unique   Sur le chemin de la Grande Perfection,...

Le Gourou e(s)t le lampadaire

Dans « le Gourou e(s)t le lampadaire », Denis questionne nos représentations souvent figées de la figure du maître, en rappelant que cette rencontre est essentielle sur le chemin de la Grande Perfection.Série : Le chemin du Dzogchèn   Le Gourou e(s)t le...

La Perfection qui tranche tout

 "La Perfection qui tranche tout", rdzogs pa spyi gcod, une traduction du Comité de traduction Dzogchen Today!Série : Traduction de textes Dzogchèn   La Perfection qui tranche tout rdzogs pa spyi gcod  Introduction Ce texte radical du Dzogchèn appartient à la...

Le coup de balai de la nouvelle année

Dans "Le coup de balai de la nouvelle année", Mila Khyentse parle de la tradition de l’ancienne et de la nouvelle année au Tibet… d’un coup de balai.Série : Nouvel an   Le coup de balai de la nouvelle année Dans le monde tibétain, on ne commence jamais une...

L’âne et le boeuf au Pays des Neiges

Dans "L'âne et le boeuf au Pays des Neiges", Mila Khyentse parle de Noël, d'animaux et de nomades tibétaines.Series: Noël   L'âne et le boeuf au Pays des Neiges Parmi les figures les plus protectrices et les plus bienveillantes du temps de Noël se trouvent le...

Les qualités d’un disciple selon la tradition

Dans «Les qualités d’un disciple selon la tradition» nous apprenons qu’avoir du respect pour soi-même peut nous apprendre à dépasser le soi.Série: Le chemin spirituel dans le Dzogchèn   Les qualités d’un disciple selon la tradition Jamyang Khyèntsé Wangpo,...

Moi et Pas-moi sont en chemin

Dans "Moi et Pas-moi sont en chemin", Grégoire propose des réflexions sur qui arpente ce chemin, et combien de temps cela peut-il prendre.Série: Le chemin spirituel dans le Dzogchèn   Moi et Pas-moi sont en chemin Dans la suite des articles sur le chemin dans le...

Un temps d’observation

Maréva partage l'importance de prendre "Un temps d’observation" au début du chemin pour bâtir des bases solides. Ecouter, étudier, pratiquer.Série: Le chemin spirituel dans le Dzogchèn Maîtres et Disciples   Un temps d’observation Le chemin peut commencer de...

Abonnez-vous à notre Newsletter

Abonnez-vous pour recevoir les dernières nouvelles, changements et les tout derniers articles de Dzogchen Today!