I broke the code
Écrit par Paul Baffier
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La victoire de Nemo à l’Eurovision avec «I broke the code» a permis de remettre à jour un des fondamentaux de notre culture : l’iconoclasme.
Série « Le chemin spirituel dans le Dzogchèn »
Commencer le chemin du Dzogchèn
I broke the code
La récente victoire de Nemo à l’Eurovision avec le morceau « I broke the code » a permis de (re)mettre au jour un des fondamentaux de notre culture récente : l’iconoclasme. Mouvement culturel enlevé, plein d’un élan punk quoique rationaliste, cet “iconoclasme” présente la rébellion comme quelque chose de désirable : une forme de sauvagerie spontanée, inscrite comme une liberté première s’affranchissant des pouvoirs et des codes. C’est notre envie de « tout foutre en l’air », en rebelles individualistes. C’est notre individualisme : c’est, en nous, l’individu qui fait système (-isme) et s’éprend d’une liberté qui lui semble infinie. C’est cette envie qui est systématiquement présente en nous, automatique dans toutes nos tâches, actions et pensées.
Depuis au moins le XVIIIème siècle avec les Lumières et au XIXème avec une certaine interprétation de la pensée nietzschéenne, la pensée iconoclaste a pris de l’ampleur et est devenue comme une seconde nature chez nous. Nous aimons ceux qui sortent de l’ordinaire, qui flirtent avec l’interdit, qui brisent la norme. A contrario, le normatif de la loi et le régulier de la règle nous paraissent « rigides », froids, ennuyeux, — somme toute peu productifs —, comme ne possédant aucun dynamisme, aucun principe innovant ou réjuvénateur.
« La liberté est un de nos dieux, un concept-pivot, axial, sur lequel est enté notre désir-attachement et notre soif de plaisir. »
Or nous associons le dynamisme à la liberté, et la liberté est bien le trésor culturel que nous chérissons. La liberté est un de nos dieux, un concept-pivot, axial, sur lequel est enté notre désir-attachement et notre soif de plaisir ; mais pour autant, et bien malgré nous, il s’agit d’une liberté individuelle, une liberté de choisir, ce que le « moi », déterminé et conditionné par une chaîne multi-factorielle infinie de causes et de conditions, a « librement décidé » de faire. On voit l’ironie de cette fausse liberté qui ne résiste guère à l’analyse…
En effet dans la tradition, le libre-arbitre n’existe pas.
Voilà pourquoi, dans notre optique culturelle, toute tradition est doublement suspecte :
- premièrement car une tradition est faite de réduplication de l’ancien, de norme, de coutumes : premier soupçon !
- deuxièmement car cette tradition expose que le moi illusoire n’a aucune liberté de choisir, étant complètement conditionné dans le moindre de ses actes corporels, pensées mentales et expériences sensitives : second soupçon !
Ainsi, si “moi” croit vraiment avoir le-droit-et-la-liberté de choisir, la tradition nous déclare alors qu’il s’agit du piège suprême, dont il est extrêmement difficile de se libérer : celui de la fausse liberté – ultime soupçon !
Une tradition qui nous dit quelque chose en profonde opposition avec ce que notre culture promeut, ne peut être que déplaisante.
Et pourtant…
La tradition Dzogchèn a ceci de déjanté qu’elle roule hors norme, sur les rails de la dynamique de l’évidence primordiale, sauvagerie qui n’a pas à s’opposer duellement à quoi que ce soit ; étant la nature de tout pouvoir ou toute règle, elle ne considère pas qu’il y ait à affronter quoi que ce soit, et donc, n’a rien à briser ; car selon le Dzogchèn, vouloir briser tout code, tout objet conditionné illusoire, ne sera qu’une volonté conditionnée illusoire supplémentaire dans la longue chaîne des volontés de sortir-et-rentrer dans des rapports de pouvoir.
Bien plutôt, l’expérience de l’évidence primordiale est celle qui, lorsqu’elle jaillit, apparaît comme étant la base de toutes les règles et dérèglements, évolutions et révolutions, codes de la route et sorties de route ; base sauvage indomptée car n’étant adossée à aucun conditionnement antérieur ; libre donc, même si d’une liberté très différente de celle que notre conception culturelle conçoit…
…libre même de sa propre conception, donc, sans concept, et au-delà de toute liberté.
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