LE HÉROS DZOGCHÈN – 2

Written by Johanne Bernard
Blog | Culture et traditions | Dzogchèn Pratique | Les bases du Dzogchèn
Dans cet article, Le Héros Dzogchen – 2, Johanne poursuit l’exploration du voyage et la façon dont le héros évolue et devient un Ami de bien.
Le héros Dzogchèn – 2
ou « Le grand saut »
Série “Comment suivre l’Ami de bien”
Rappelons-nous, l’ami de bien avait laissé son apprenti héros Dzogchèn au début de son aventure, au seuil du monde inconnu. Le voici, plus avancé dans son voyage… Combien de temps s’est-il écoulé ?
Selon la tradition, la vitesse du chemin dépend de l’entraînement des vies passées : plusieurs dizaines d’années, une vie, des vies, des kalpas [1] diraient les maitres tibétains. Dans le cas de notre apprenti héros, disons qu’un certain nombre d’années s’est écoulé… Alors, que s’est-il passé pendant tout ce temps ?
Eh bien notre apprenti héros s’est entraîné en explorant chaque jour un peu plus son esprit, qui est devenu pour lui de moins en moins inconnu. Il a traversé des obstacles, beaucoup d’obstacles… sinon ce ne serait pas une aventure. Souvent, il est retourné voir l’ami de bien. Il y est allé, parfois désespéré, parfois impatient, parfois aussi très content, et de plus en plus joyeux. A chaque fois, il lui a demandé de nouvelles instructions. Et l’ami de bien, voyant sa motivation, les lui a données : il lui a demandé de se lever, puis de s’asseoir, puis de se lever à nouveau, pour stabiliser sa vue, sa compréhension, afin de poursuivre son voyage.
« C’est si simple, et cela semble si compliqué au début : tout est nature de l’esprit, pure, vide et spontanée. Tout est Grande Perfection. »
Notre apprenti héros a appliqué les instructions. Il a fait face à ses émotions, et aux émotions des autres, jusqu’à se rendre compte qu’il n’y avait pas de différence. Il s’est assis, puis il s’est levé, puis il s’est assis, jusqu’à se rendre compte qu’il n’y avait pas de différence. Il est allé auprès de l’ami de bien, il est reparti seul, il est retourné auprès de l’ami de bien, jusqu’à se rendre compte qu’il n’y avait pas de différence…
Petit à petit, il a fini par stabiliser la vue : l’état de Rigpa [2], la sagesse primordiale, s’est élevée. Notre apprenti héros a réalisé que ce qu’il pensait être des obstacles n’étaient pas des obstacles, mais la manifestation de la base primordiale de son esprit. Il a réalisé que la bodhicitta, “l’esprit pur et parfait”, qu’il avait eu tant de mal à faire s’élever au début, était la nature primordiale de tous les êtres. Il a acquis la certitude et la confiance. Il a acquis la patience, envers lui-même et envers autrui. II est devenu comme un caméléon qui change de couleur selon l’endroit où il se trouve, tout en restant toujours le même. Il a commencé à intégrer la sagesse à son quotidien.
Il a compris, surtout, qu’il avait fait tout ce chemin pour réaliser que ce qu’il cherchait était là dès le début. Il s’est levé, puis s’est assis, puis s’est levé à nouveau pour se rendre compte finalement, qu’il n’y avait rien à faire. C’est si simple, et cela semble si compliqué au début : tout est nature de l’esprit, pure, vide et spontanée. Tout est Grande Perfection.
Sur le visage de l’ami de bien, un grand sourire s’épanouit : son apprenti héros est devenu un héros… Un héros qui comprend maintenant ce que veut dire ami de bien : celui qui pointe la nature de la réalité. Il sait que, fondamentalement, il n’y a jamais eu de voyage. Comme un électron qui fait une boucle sur lui-même, il n’est jamais parti et n’est jamais revenu.
Il est temps pour l’ami de bien de laisser son héros guider à son tour d’autres êtres. Lui, peut poursuivre son aventure, car elle n’est pas encore vraiment terminée. Il lui reste encore l’ultime grand saut à faire. Celui qui fera de la fin de son aventure, un retour sans retour.
Ce retour sans retour, c*’est Ölü* , l’atteinte inaltérable, celle qui n’arrive qu’une fois le résultat de la pratique de Thögäl, le grand saut, le franchissement du pic, atteint. Ce grand saut, seuls les grands pratiquants le connaissent. Dans la tradition, on parle des grands Bodhisattvas [3]…
Encore une fois, l’ami de bien ouvre la voie à son apprenti, qui est devenu un héros. Car ce que le héros, devenu à son tour ami de bien, ne sait pas encore, c’est que lui aussi, à la base, comme tous les êtres, est un grand Bodhisattva…
[1] Kalpa : mesure de temps très long dans le monde bouddhiste. On dit que 4 kalpas définissent la création et la destruction de l’univers. BACK
[2] Rigpa : « évidence primordiale », la présence naturelle de l’aspect primordial de l’esprit.
[2] Bodhisattva : https://www.rigpawiki.org/index.php?title=Bodhisattva
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