Préserver le Dzogchèn

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Dzogchèn, l’experience directe

Lorsque l’on parle de préservation, la première chose qui vient immédiatement à l’esprit lorsqu’il s’agit du Dzogchèn, de la tradition de la Grande Perfection, est de préserver son enseignement sur la nature de l’esprit et sa maîtrise.

C’est le cœur et la force de cette tradition : sa connaissance impressionnante et très fine du fonctionnement de l’esprit humain, de sa relation avec le corps, avec ce qui nous entoure et l’univers, et la possibilité de le maîtriser parfaitement.

Dans la tradition du Dzogchèn, cette connaissance et cette maîtrise sont en même temps une connaissance intellectuelle, théorique et graduelle, mais aussi et surtout une connaissance directe. On pourrait la qualifier de « méta intuitive », qui se transmet le plus souvent sans mots, une expérience directe immédiate, et qui est préservée comme le trésor le plus précieux au travers de lignées toujours vivantes depuis son fondateur Garab Dorjé.

La seconde chose importante à préserver dans le Dzogchèn, ce sont les textes d’origine qui sont divisés en trois séries d’enseignements : les textes du Sèmdé – 21 au total et dont « Le Roi Créateur de Toute Chose » est le texte racine – les textes du Longdé, 13 au total, dont « Le Tantra Royal de l’Immensité tout-englobante de Samantabhadra » est le texte racine ; et les textes du Mènngagdé – qui sont au nombre de 17, parfois 19, dont « Le Tantra de la Réverbération du Son » est le texte racine.

Tous ces textes comprennent des explications sur la nature de la réalité, de l’esprit et du tangible ; des moyens à mettre en œuvre pour maîtriser ces trois aspects, que l’on appelle « pratiques » ; des commentaires des deux premiers ; et des instructions cruciales qui sont généralement un ensemble des conseils les plus cruciaux qu’un enseignant peut donner à ses élèves.

La troisième chose importante à préserver est le cadre de la transmission hérité du monde tibétain – le plus proche de nous –, du monde indien – plus lointain –, et peut-être du monde centrasiatique – mais plus difficile à déterminer. Ce cadre constitue tout le savoir oral transmis sous diverses formes car elles ont dû s’adapter, notamment aux conditions changeantes des différentes époques, mais également aux multiples cultures rencontrées tout au long du chemin de la propagation des enseignements de la Grande Perfection. Ce dernier point est le plus délicat en termes de préservation car maintenir vivante l’oralité est toujours plus difficile que l’écrit.

Enfin, la quatrième et dernière chose importante à préserver – et qui est intimement liée à la précédente – est le rituel, ou plutôt les rituels car, non seulement chaque pratique a son rituel particulier avec ses gestes, ses objets, ses matériaux spécifiques, mais en plus chaque région ou lignée d’enseignements a un rituel différent de ceux d’à-côté. Dans la perspective de notre civilisation occidentale moderne, cette dernière forme tomberait certainement dans la catégorie muséologie. Mais ce n’est pas uniquement de cela dont il s’agit ici. Certes, il est important de conserver les objets, les témoignages, etc. et de les exposer, mais il est encore plus important de préserver le vivant de l’acte, pour pouvoir faire en sorte qu’il se perpétue car c’est également donner l’opportunité à toute une culture de pouvoir continuer à exister. Voilà pourquoi le projet Dzogchen Today! est en lien avec un grand nombre de lignées traditionnelles du monde himalayen.

La préservation du Dzogchen traditionnel est un enjeu crucial pour nous aujourd’hui. Nous devons nous préoccuper de ce qui est essentiel à sauvegarder pour les générations futures. De plus, il n’y a que ce qui a été préservé qui peut être adapté et transmis.

Voici la première marche du projet Dzogchen Today! : préserver pour adapter.

Written by Mila Khyentse

Mila Khyentse est un enseignant français du Dzogchèn et du Bouddhisme tibétain et l'initiateur du projet Dzogchen Today!

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