Crocodile Dzogchèn

Écrit par Nils Derboule
Blog | L'aventure Dzogchèn
Dans « Crocodile Dzogchèn », Nils évoque la façon dont nous suivons le chemin du Dzogchèn en explorant le territoire inconnu qu’est notre esprit.
Série : où pratiquer le chemin du Dzogchèn ?
Crocodile Dzogchèn
L’avantage de la Grande Perfection, c’est qu’il n’y a pas besoin d’aller la chercher ailleurs que là où est notre esprit. Même si la plupart du temps, on ne sait pas ce qu’il est vraiment, ce n’est pas un problème : on peut être fan d’Indiana Jones et tenter tant bien que mal d’arpenter le chemin du Dzogchèn.
Lorsque j’ai rencontré la Grande Perfection, qui avait l’apparence d’un être humain, français de surcroît, je me suis senti comme un chien fou : partir à l’aventure avec un but précis, voilà ce dont j’avais toujours rêvé !
J’étais comme Demi Lune qui allait bientôt se retrouver dans la jungle indienne avec le Professeur Jones suite au crash de leur avion. Pas complètement rassuré, mais prêt à aller au bout du monde (et surtout à se sortir du pétrin) avec un enthousiasme parfois un peu trop débordant .
D’ailleurs, ne fallait-il pas aller arpenter l’Himalaya, là où la tradition a pris racine au 8ème siècle ? S’approprier la culture tibétaine (ou ladakhi, népalaise, bhoutanaise) pour être sûr.e de méditer correctement ? Comprendre tout ce chatoiement de tentures, d’habits et de rituels, pour les imiter au mieux ?
Cette touche d’exotisme m’a fasciné un temps – en vérité, pas très long. J’ai assez vite réalisé que tout cela était peut-être attirant, mais que ça n’avait pas grand-chose à voir avec la Grande Perfection, car celle-ci se pratique avec notre propre esprit et les instructions du maître. Nul besoin d’autre chose, si ce n’est quelques qualités de base qui se développent avec la Vue sur le chemin : diligence, patience, persévérance, patience, compassion, patience, vigilance, patience, force, patience…
« Si nous sommes excités par cette nouvelle découverte, le canot vibre et les rapides menacent de nous faire chavirer. Avec dans le cœur les paroles du maître, nous laissons aller et le flot de l’état naturel se fait jour.«
Donc, sans dépenser un penny en matériel ou en billets d’avion, on s’embarque sur le frêle canot pneumatique qu’est notre esprit. Perdu dans la jungle des conditionnements habituels (un café pour se réveiller), de la pression sociale (les enfants c’est la vie) et de la vision de l’existence de notre entourage (carrière-propriétaire), on descend la rivière tant bien que mal, sans vraiment savoir où on va. Ça chahute, pour sûr.
Au début la rivière nous porte, nous n’en avons aucune maîtrise et nous restons concentrés sur notre ignorance de la navigation : on découvre un monde de sensations, de pensées et d’émotions d’une richesse infinie et effrayante. Puis petit à petit, avec l’apaisement mental, nous commençons à lever la tête et à observer le paysage. Autour de nous défilent également une foultitude d’apparences qu’il est bon de regarder (y compris les crocodiles qui dérivent à nos côtés et qui n’attendent qu’une chose). Cela dure un temps puis, comme tout, nous nous en lassons. Alors, avec la concentration solidement établie, ces apparences disparaissent pour laisser place à leur nature véritable.
Là commence la vision pénétrante. Si nous sommes excités par cette nouvelle découverte, le canot vibre et les rapides menacent de nous faire chavirer. Avec dans le cœur les paroles du maître, nous laissons aller et le flot de l’état naturel se fait jour.
Lentement, dans le quotidien comme sur le coussin ou la chaise, nous nous familiarisons avec la perception directe (pense-t-on) de la nature de l’esprit.
Jusqu’à ce qu’un choc nous propulse dans la rivière : le pneumatique qu’est notre esprit vient d’éclater contre le tronc de la bénédiction des Seigneurs de l’évidence primordiale.
Notre esprit, devenu si cher à notre cœur au fil des années, n’est plus là. Mieux : il ne l’a jamais été.
Nous nous retrouvons nus, et mouillés, par l’expérience fondamentale. Même les crocodiles ont disparu.
Un autre entrainement démarre alors, avec l’exact même goût d’aventure que le précédent. Car en réalité, c’est toujours la même chose qui se poursuit : soit les tendances karmiques fondamentales, soit la nature primordiale.
Sur ce chemin essentiel, nous comprenons qu’aventure, rivière, radeau, jungle et crocro n’ont jamais été ailleurs qu’au sein de notre esprit, qui n’est autre que la sphère unique.
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